samedi 23 février 2008

Idées reçues

C’est une pauvre fille qui loue son corps pour se faire un peu de blé. Y en à beaucoup par ici. A la nuit tombée, on les voit débarquer, ces gamines déguisées en peau de putes. Des fleurs de bitume en quête d’existence.
Ca me fait mal aux tripes. Elles vont, elles viennent, dans des paradis artificiels montés de toutes pièces, pour pas crever comme des chiennes à qui ont a brisé les ailes.
La denrée ce fait rare ces temps ci. Plus grand chose à se foutre sous la dent.

Une clope et je m’arrache. Y a rien à faire, plus rien depuis que tout est fini. On ne fait que survivre pour ne pas finir ivre.. Tiens, même les rats en on marre de toute cette merde, ils se font la belle.
La lune brille fort ce soir. Ca me rappelle des souvenirs. L’époque ou il y avait des étoiles dans le ciel du soir. Passer son temps à les regarder nous conter des histoires. C’est vieux tout ça. J’étais môme. Pas la même génération.
Pas comme eux, Regarde les, à traîner les rues, livides, face contre terre . On leur apprend pas à sourire.
C’est quoi cette époque, ça me file le blues . Y a rien d’autre à faire ici, qu’avoir le blues. Y a même plus d’imagination.
Ca fait trois ans que ça été aboli. Plus le droit d’imaginer, de rêver, plus le droit à rien.
J’en ai vu des mecs, se faire arracher à leur existence, devant femmes, enfants, voisins, amis, pour avoir osé imaginer… Quoi ? On le saura pas. Ils plaisantent pas avec ces choses là. T’en reviens pas, quand ils viennent te cueillir. Comme cette belle de trottoir hier soir, qui s’est fait serrer à l’angle de la 7eme. Elle à du imaginer … Un monde meilleur… Ou peut être une passe à 10 000, qui sait ? Sa boite noire le sait. Et eux !

Tout à commencé, y a quelques années, quand le gouvernement à mis en place, le taux criminalité zéro. Après l’alcool, les radars, la clope, les vêtements en polyamide, et les bonbons Haribo, ce fut autour de la criminalité. Objectif taux zéro. Ce qui a occasionné la hausse du chômage. Plus besoin de flics. L’idée était pas mauvaise en soi. Ils nous ont fait passer ça pour une aire nouvelle, sans peur, sans crainte de voir tes mômes un jour enlevés par un détraqué sexuel. Plus peur de voir un matin avant de partir au taff, ta caisse cramée sur le bord de la route. Plus besoin de dormir avec un gun en guise de doudou dans ton pieu. Des marchands de bonheur, ouais des marchands de bonheur. Tu parles, une belle connerie.

On nous à implanté une puce, pas plus grosse qu’une tête d'épingle, entre l’hémisphère droit et l’hémisphère gauche du cerveau, juste là. Tu ne la sens pas. Mais elle, elle te sent. Elle enregistre toutes tes pensées, qu’elle retransmet à la banque centrale des idées reçues. Là-bas tout est lu, analysé, enregistré, daté et numéroté, toute ta vie en pensées ne t’appartient plus. Elle leur appartient.
Chaque mois ils t’envoient ton relevé cérébral, la moindre connerie qui t’est passé par la tête est écrit là, noir sur blanc. Ca a pour but de contrôler et d’appréhender le criminel potentiel qui sommeil en nous. Avant qu’on ne pense à tuer son voisin, sa voisine, ou la vieille du coin qui fait pisser Youyou son caniche angora tous les soirs (après sa tisane nuit douce), sur les pneus de ta caisse.
Le seul avantage que j’y ai trouvé, c’est la diminution considérable des gens atteints de la maladie d’Alzheimer. Mais est ce que c'était pas mieux d'oublier, finalement.
Quand tu meurs, ils viennent chercher ton corps et ils le brûlent avec ta boite, ta boite noire, qui contient la mémoire de ta vie. Toi, tes pensées, tes souvenirs, dans le même brasier.

On ne plus faire d’erreur, le vieil adage qui disait l’erreur est humaine n’est plus d’actualité.
Ils ont bien fait leur travail, plus de criminalité, plus de danger, tu peux dormir la porte ouverte, il ne t’arrivera rien. Il n’arrive plus rien. Y a plus de vie, plus d’imagination.
Je me souviens étant enfant avoir imaginé un futur, ou les machines se mêleraient aux Hommes. Nous étions des genres de robots, fantasme de Robocop. On en est pas si loin. Sauf qu’à sa grande différence, nous ne sommes pas forts, et pas invincibles.
Nous sommes juste des Hommes qui avons peur, peur de vivre, et nous nous sommes fait bouffer par notre connerie.

Tout ce que je vous raconte là, est enregistré, analysé, imprimé. La concierge de mon immeuble recevra dans quelques jours mon relevé cérébral, en même temps que le sien et ceux des autres occupants.
Je serais plus là pour me relire. Ils doivent déjà être en route pour venir me chercher.
Tout ça, car j’ai imaginé vous raconter l’histoire de votre futur.
Je…

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